Une nature d'exception

You are here

Le baguage des Guifettes moustacs

La Guifette moustac (Chlidonia hybrida) est un oiseau  protégé, emblématique de la Brenne de par ses effectifs nicheurs et la notoriété due à sa facilité d’observation. C’est aussi une espèce « porte-drapeau » des zones humides, qui permet de sensibiliser un large public aux stratégies de conservation.

Enfin, c’est une espèce « parapluie » dont la protection est aussi favorable à une multitude d’autres espèces (ornithologique, botanique, entomologique, herpétologique…).

Le baguage coloré des guifettes moustacs en Brenne.

Initié depuis 2001, un suivi de population de la Guifette moustac (Chlidonias hybrida) est effectué en Brenne.

Cette étude se déroule en deux temps :

  • la recherche et la localisation des colonies de nidification, puis leur suivi au rythme d’une visite tous les dix jours ;

  • la pose de bagues sur les poussins et les adultes, qui permet de savoir si les individus reviennent en Brenne chaque année, et, si oui, s’ils nichent sur l’étang qui les a vu naître…

Les objectifs de cette étude  à long terme sont de fournir des informations sur la migration, la dispersion, la fidélité aux sites de nidification, l’âge de la première reproduction et, à plus long terme, l’âge moyen des individus de cette espèce.

Ces renseignements sont essentiels pour mieux comprendre les phénomènes qui régissent la vie des Guifettes, précisions indispensables pour une protection adaptée des étangs. Les résultats obtenus permettent en outre d’évaluer la pertinence de la gestion actuelle menée sur certains sites, en faveur de cette espèce.

Bilans

Bilan du baguage

Rappel : le principe du baguage est de capturer un individu, de le peser et le mesurer, puis de placer autour d’une ou des deux pattes un anneau soit métallique, soit de couleur, sur lequel est inscrit un numéro d’identification. Ce numéro est attribué exclusivement par le Muséum d’Histoire Naturelle. Sans oublier que la capture d’un animal protégé est interdite, ainsi que sa manipulation et qu’il faut des autorisations spéciales et une formation spécifique pour pratiquer.

 

En moyenne, 92,6 Guifettes moustacs ont été baguées à l’aide de combinaisons colorées en Brenne, chaque année depuis 2002.

Au total, 1390 oiseaux ont été bagués en Brenne dont 116 en 2016 (113 poussins et 3 adultes).
 

Bilan des contrôles

Rappel : lorsqu’un individu bagué ou marqué est observé avec suffisamment de finesse pour identifier le code de son marquage, on dit qu’il est contrôlé.

Au total, 34 individus différents bagués en Brenne ont été contrôlés en 2016.

Parmi ce nombre, 32 oiseaux ont été contrôlés en Brenne, un autre en Camargue et le dernier a été vu au mois de juin en Hongrie et trois semaines plus tard en République Tchèque ! Par ailleurs, un oiseau bagué en Espagne a été contrôlé en Brenne à deux reprises cette année.

En totalisant les individus contrôlés à plusieurs reprises en 2016 en Brenne, ce sont 57 données de relecture qui ont été obtenues.

Rappelons cependant que les données de baguage (depuis 2001) et de comptage (depuis 1982) des Guifettes moustacs en Brenne ont été statistiquement analysées. Les principaux résultats obtenus sont les suivants :

  • le baguage a permis de mettre en évidence que la survie des jeunes d’une année sur l’autre est en diminution en Brenne depuis 2006 (20 % en 2015, contre 78 % en 2007) ; les adultes, quant à eux, ont une survie relativement constante dans le temps (75 % d’une année sur l’autre) ;

  • la diminution de la survie juvénile semble principalement liée à des facteurs propres à la Brenne. Par exemple, l’abondance ou la défaillance de la pluviométrie impacte les niveaux d’eau, et donc la survie des jeunes. De plus, la réduction des habitats disponibles en Brenne entraîne une augmentation du nombre de couples par colonie, ce qui influe sur la survie des poussins. Le nombre de couples produisant des jeunes à l’envol s’en voit également affecté ; ainsi, la taille optimale des colonies pour assurer un succès de reproduction supérieur à 70 % se situerait entre 60 et 120 couples ;

  • parallèlement, les données issues des comptages montrent que le nombre de couples nicheurs de Guifettes moustacs en Brenne est en déclin depuis 2006. Ce constat peut être attribué aux mauvaises conditions météorologiques au Sahel (excès de précipitations) et à la diminution du succès reproducteur en Brenne.

Seule la continuation du programme de baguage et de contrôle des Guifettes moustacs permettra d’avoir des résultats fiables à ce sujet. Cette étude sera également l’occasion de vérifier la pertinence des mesures de gestion appliquée en faveur de l’espèce, notamment « l’opération Nénuphars » menée par Chérine et le PNR Brenne entre 2012 et 2015 sur 54 étangs, dont l’un des arguments principal était de reconstituer des habitats favorables à la nidification de cet oiseau.

Sans oublier que cette étude nous renseignera également sur l’impact des changements climatiques sur cette espèce. Il est connu, par exemple, que les oiseaux migrateurs peuvent quitter leurs zones d’hivernages plus tôt suite à un stimulus environnemental favorable et arriver dans leur zone de nidification alors que les conditions ne sont pas encore propices et que toutes les ressources nécessaires ne sont pas disponibles (développement de la végétation, alimentation,…). Dans ce cas, l’intérêt d’un suivi à long terme s’avère évident afin de comprendre comment les Guifettes pourront pallier ces changements, et ce au niveau individuel, grâce au baguage coloré (étude de la phénologie* de la reproduction, des déplacements / reports sur d’autres sites, des conditions corporelles des poussins,…).

* La phénologie est l'étude de l'apparition d'événements périodiques (annuels le plus souvent) dans le monde vivant, déterminée par les variations saisonnières du climat.